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Suite aux soirées de présentations publiques de notre projet, nous avons été informé de cet article fort intéressant en totale adéquation avec le réglement intérieur des Carnets d'ICI |
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Qu'elle soit à caractère social, culturel, sportif, patriotique ou de loisirs, l'association est désormais le lieu privilégié de rassemblement entre habitants d'une même commune, autour d'une même passion, en poursuivant le même objectif. L'élu local, qu'il soit maire, maire-adjoint ou conseiller municipal, peut-il en être membre, voire en accepter la présidence? |
Association et gestion de fait, association et délit d'ingérence, association et prise illégale d'intérêts, association et conseiller municipal intéressé, association et entrepreneur de services municipaux, association et inéligibilité! Que de mots rencontrés çà et là, dans la rubrique des faits divers et qui peuvent faire peur aux élus, lorsqu'ils sont en relation avec une association. Faut-il s'alarmer? Faut-il renoncer? Les élus sont souvent sollicités pour faire partie de ces associations, pour en prendre la présidence, qu'elle soit d'honneur ou effective. Certains sont même à l'origine de la création de l'association, et en deviennent les véritables gestionnaires. Est-ce compatible avec leur fonction élective? Ne risquent-ils pas d'être gestionnaires de fait, ou accusés de prise illégale d'intérêt? |
La gestion de fait Le principe de séparation de l'ordonnateur et du comptable est au centre de l'organisation financière de la commune. Le paiement d'une dépense ou l'encaissement d'une recette nécessite le recours à deux personnes bien distinctes: le maire qui est l'ordonnateur (il engage, liquide et ordonnance) et le receveur municipal qui est le comptable (il paye ou encaisse). Les deux fonctions sont incompatibles: celui qui ordonnance ne paie pas, celui qui paie n'ordonnance pas. Toute personne qui, sans autorisation, s'immisce dans le maniement des deniers publics peut être déclarée comptable de fait. Or le comptable est inéligible dans le ressort de son activité. Tout élu, déclaré comptable de fait, sera donc frappé d'inéligibilité. Que sont les deniers publics? Il s'agit bien évidemment des sommes appartenant aux personnes publiques. Mais il peut s'agir également de celles détenues par des personnes privées, et notamment par des associations. |
La tentation associative.... L'association repose sur un contrat de droit privé, et la tentation peut être grande pour une commune de créer une association (type 1901) afin d'échapper aux règles de droit public (comptabilité publique, marchés publics, statut de la fonction publique territoriale, jugement des actes). Il s'agit alors d'un démembrement du service public. La volonté associative est oubliée. Seule subsiste la tentation associative, outil de contournement des obligations de la gestion publique. Tentation de n'être assujetti qu'aux règles de la comptabilité privée: liberté de dépôt des fonds auprès d'un organisme bancaire, absence de séparation entre l'ordonnateur et le comptable. Tentation de pouvoir disposer d'une totale liberté dans les achats et les ventes, sans recourir aux dispositions du code des marchés publics. Tentation de pouvoir recruter des collaborateurs dans des conditions librement déterminées entre les parties. Tentation de pouvoir gérer "dans l'intimité", entre amis, sans être obligé de rendre compte publiquement, en limitant la transparence à la communication en assemblée générale où ne siègent que quelques initiés. Tentation enfin de pouvoir bénéficier de certains avantages concurrentiels, notamment en matière de subventions et de fiscalité. |
Un danger: l'association transparente Si les associations locales trouvent leurs ressources dans leurs activités (cotisations, organisation de fêtes, matches ...) elles ont souvent recours à des subventions publiques versées par l'État, les communes, départements ou régions. Or, dans le cas de la tentation associative, la création d'une association est considérée comme un démembrement du service public local. L'association ne dispose alors d'aucune liberté dans l'utilisation des fonds, le pouvoir de décision appartenant toujours à la collectivité qui les a versés. Dans ce cas, les subventions sont qualifiées de fictives et les sommes ainsi versées gardent leur caractère de deniers publics. Les personnes qui les manient, ou qui tolèrent leur maniement, alors qu'elles ne sont pas habilitées en tant que comptable public, peuvent être déclarées gestionnaires de fait. Une réponse ministérielle à une question écrite, parue au journal officiel du 23 décembre 1991, précise que " les communes ne peuvent se décharger sur une association de la poursuite d'un objet d'intérêt communal ou départemental ... Lorsque le recours à une association s'analyse comme un démembrement pur et simple d'un service relevant des missions de la collectivité locale, ne disposant d'aucune autonomie de gestion par rapport à celle-ci, les responsables de l'association relèvent du juge des comptes, s'ils ont manié ou détenu des fonds émanant de la collectivité locale ou lui revenant". Il convient par ailleurs de préciser que l'adhésion d'une commune à une association est de la compétence du conseil municipal, et nécessite une délibération expresse: "une telle décision n'entre pas en effet dans les pouvoirs propres du maire et n'est pas par ailleurs de celles qui peuvent être déléguées au maire par le conseil municipal" en application de l'article L.2122-22 du code général des collectivités territoriales. Pour relever la gestion de fait dans pareil cas, le juge financier a développé la notion d'association transparente. Une association est qualifiée de transparente lorsque trois conditions sont réunies: elle poursuit une mission de service public, ses ressources financières sont majoritairement publiques, le pouvoir de décision au sein de l'association appartient principalement à des élus ou à du personnel de la collectivité locale. Les deniers gérés par une association transparente ont la qualité de deniers publics. Il y a gestion de fait puisque le maniement ou la détention se sont faits sans titre légal par une personne qui n'a pas la qualité de comptable public. La poursuite d'une mission de service public par une association n'enlève pas le caractère public des deniers ainsi gérés, et les responsables de l'association, élus ou non, peuvent être déclarés comptables de fait. La gestion de fait n'est pas prononcée en raison de la gestion d'une association par des élus, mais en fonction de la transparence de ses opérations. Il peut y avoir gestion de fait alors même qu'aucun élu n'est dirigeant de l'association: c'est le cas par exemple d'une association, poursuivant une mission de service public (gestion d'un théâtre, d'une halte-garderie, d'une cantine ...), fonctionnant grâce à des fonds majoritairement publics (subventions, droits d'entrée qui auraient normalement du être encaissés par la commune) et qui n'a pas d'indépendance vis à vis de la commune (elle fait ce qu'on lui dit de faire!). A l'inverse, il peut ne pas y avoir gestion de fait alors même qu'un élu préside l'association: pourquoi empêcher un maire, passionné d'aviation, d'être président de l'aéro-club! Même si l'association perçoit une subvention de la commune, elle ne poursuit pas une mission de service public et ne gère pas un service public (il en serait tout autrement si la gestion de l'aérodrome municipal était confiée à l'aéro-club) . |
La volonté associative.... Le dynamisme de nos communes, grandes ou petites, est due à l'imagination, au savoir faire, au bon sens et à la disponibilité des élus locaux. Maires, conseillers municipaux, généraux ou régionaux concentrent en effet leur énergie sur un objectif: répondre à l'attente de la population en donnant satisfaction à un maximum de souhaits particuliers, tout en préservant l'intérêt général. Mais ce dynamisme trouve également son origine dans la richesse et la diversité de la vie associative. Adhérer, c'est faire preuve d'une volonté associative. Y prendre des responsabilités, c'est animer, dynamiser, motiver, rassurer, encourager toute une équipe de personnes qui partagent le même but. Manifester une telle volonté associative, c'est mobiliser les enthousiasmes, les générosités, le bénévolat, c'est s'investir personnellement dans le souci de développer des passions communes, de préserver des intérêts mutuels, de créer de nouveaux lieux de rencontre des citoyens. |
La nécessité d'une convention de partenariat Il est bien évident que la création d'une association ne doit pas avoir pour seul but de contourner les lois et règlements en vigueur. De plus en plus, les grands clubs sportifs doivent se tourner vers de nouvelles structures juridiques mieux adaptées à la gestion de l'activité de leur équipe première: société d'économie mixte sportive, ou société anonyme à objet sportif. Les associations perçoivent des subventions publiques, indispensables à leur survie, et à la poursuite de leur activité d'intérêt général. Les communes qui attribuent ces subventions ne peuvent pas se désintéresser de l'utilisation qui en est faite. Elles doivent demander que leur soient fournis régulièrement les budgets et les comptes de l'association bénéficiaire. Pour se protéger de la gestion de fait, il est nécessaire de détailler l'ensemble des relations entre la collectivité et l'association dans une convention de partenariat déterminant clairement les obligations réciproques. Ce document doit comporter au minimum : la définition précise de l'objectif général ou des actions dont l'association s'assigne la réalisation, l'ensemble des moyens qu'elle mettra en oeuvre à cet effet, l'indication de son budget total ou de celui de l'opération subventionnée le montant de la subvention allouée par la collectivité, ou celui de la rémunération correspondant à la prestation fournie (personnel, locaux, matériel...), le calendrier et les modalités de son versement les modalités et délais de production des comptes, ainsi que des comptes rendus d'exécution, l'organisation du contrôle et les règles de dénonciation de la convention. Il est bon de le compléter par les obligations imposées à l'association par la collectivité, et celles que s'impose la collectivité vis à vis de l'association. La gestion de fait est un risque dont l'élu doit savoir se préserver. Mais ce risque n'est pas unique. Le maire ne peut-il pas se voir reprocher de participer à la décision d'octroi d'une subvention à une association dont il est par ailleurs le président? Ne s'agit-il pas là d'une prise illégale d'intérêt, punie par le nouveau code pénal? |
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